Soeur Annelise Jung, Spiritaine française, accompagne des jeunes femmes réfugiées et demandeuses d’asile en France. Elle nous partage la joie de l’entraide et des rencontres.
En sortant d’une réunion de l’Association « Aide aux Eglises d’Afrique », Nicole, une Sœur de Notre-Dame d’Afrique, me demande si je ne voulais pas participer à l’accueil de femmes réfugiées. Je lui demande, où et comment se passe cet accueil. Nicole me répond que le mieux serait de venir voir le mardi ou le jeudi après-midi à Ménilmontant, 9 rue du Retrait. C’est ainsi que je suis entrée en contact avec l’association « les Champs de Booz ».
Cette association a été constituée en 2003 par des congrégations religieuses féminines qui se sont unies pour tenter d’apporter une réponse aux besoins des femmes réfugiées arrivant en France, dans un grand dénuement et vivant dans l’insécurité. Le constat qu’il n’existait pas de structure particulière pour accueillir les femmes seules, a déterminé le but de l’association « Association pour l’aide et le soutien aux femmes seules, demandeuses d’asile, en cours de régularisation et d’insertion ».
Le nom de l’association « les Champs de Booz » a été choisi en référence au récit biblique du livre de Ruth. Ruth la Moabite accueillie en terre d’Israël, exprime l’esprit dans lequel l’association veut agir. L’association est uniquement financée par des dons, sans aide de l’État ou d’un organisme officiel. C’est une équipe de bénévoles qui anime et gère le réseau d’entraide et de services pour les femmes seules sollicitant l’asile.
Les femmes qui s’adressent à l’association viennent en majorité d’Afrique, du Proche et du Moyen-Orient, de l’Asie. Ces derniers temps, il y a une affluence de femmes et de jeunes filles venant du Tibet. Chacune a son histoire personnelle, mais elles ont en commun d’avoir fui leur pays où elles ne se sentaient plus en sécurité, pour des raisons politiques ou autres, mariage forcé, violence, laissant derrière elles parfois des enfants encore en bas-âge. Elles sont dans une situation de grande précarité et de fragilité, parfois dans la rue. Dans l’urgence, l’association peut les adresser aux Missionnaires de la Charité qui peuvent les héberger un ou plusieurs mois quand il y a de la place dans leur Centre d’accueil. Leur première demande c’est de trouver un hébergement, et de les aider dans leurs démarches administratives qui ne sont pas simples. Une juriste est présente dans l’équipe de pilotage, aide précieuse, ainsi qu’un médecin et une psychologue disponibles pour écouter et aider.
Dès la première rencontre, j’ai été impressionnée par la simplicité et la chaleur de l’accueil des femmes venues demander de l’aide. Chacune est reçue, saluée par les bénévoles et les femmes déjà présentes sur place. La présentation se fait simplement en disant son prénom, la personne accueillie comme celle qui accueille. Certaines sont déjà venues et sont heureuses de se retrouver dans une ambiance familière. Souvent les femmes qui attendent vont ouvrir la porte quand cela sonne pour recevoir les nouvelles venues.
Chacune inscrit son nom sur un cahier en arrivant et elles seront reçues à tour de rôle pour exposer leur demande, leur situation pour laquelle elles viennent solliciter aide et conseil. Parfois l’ambiance est plus tendue quand une femme arrive angoissée, même en larmes. L’accueil de toutes est encore plus important, une tasse de thé ou une boisson fraîche sont proposées. Le mardi après-midi un atelier de couture, tricot, bricolage, dessin, leur permet de s’exprimer et d’oublier un moment leur angoisse, elles sont heureuses de ce moment de partage. Tous les mardis matin, un cours de français est proposé par une bénévole, cours bien appréciés par les femmes. Des sorties sont aussi organisées pour leur permettre de découvrir Paris et de mieux se connaître entre elles.
Je suis très heureuse de pouvoir apporter ma petite part à cet accueil. Je me sens pleinement en mission auprès de ces femmes dans une présence fraternelle d’écoute et d’accueil. Et quelle joie quand une femme africaine s’exclame, lorsque je parle avec elle de l’Afrique « mais vous connaissez ! ». Un lien est établi, nous ne sommes plus étrangères. Je suis en admiration devant le courage de ces femmes qui malgré leur parcours douloureux gardent l’espérance d’un avenir meilleur et qui continuent de se battre pour une vie digne. J’ai aussi découvert la grande générosité des bénévoles qui se donnent pour aider ces femmes en détresse, sans compter leur temps, disponibles pour répondre à une demande par téléphone même le week-end et pendant les vacances cherchant le meilleur moyen de les aider, dans un grand respect des personnes. Je termine par cette appréciation d’une des femmes : « Les Champs de Booz, pour moi c’est tout, l’amitié, les parents, la famille, je n’avais plus rien ».
Sr Annelise Jung