Mes Chères Sœurs, 

      Chers Amis,

« Au commencement était le Verbe ». Cf. Jean 1, 1. Ainsi commence notre histoire. C’est bien de cela qu’il s’agit dans l’Évangile. Les récits de Noël et de l’Épiphanie nous font découvrir de belles personnes et de magnifiques rencontres, des paroles entendues et des mots échangés, des moments intenses d’écoute et des regards remplis d’émerveillement. 

Mais dans cette histoire du Verbe, il y a surtout un accueil du réel très frappant par les différents personnages des récits de l’Évangile. Par exemple, « quand Joseph se réveilla, il fit ce que l’ange du Seigneur lui avait prescrit : il prit chez lui son épouse ». Cf. Matthieu 1, 24. Pourtant Joseph ne voulait pas dénoncer publiquement Marie, mais il avait décidé dans son cœur, étant donné le contexte social et religieux dans lequel ils vivaient et la situation incompréhensible de l’avenir qui se présentait, de la renvoyer en secret. Malgré cela, Joseph accepte de courir le risque. Il prend le risque d’une écoute libre et engageante : Joseph prend Marie chez lui. Quel courage audacieux !

Dans cette histoire de l’Incarnation du Verbe, nous observons aussi Marie qui s’abandonne sans la moindre résistance. Dans un saut de la foi, elle plonge dans la confiance que lui inspirent les paroles de l’Ange, même si humainement, elle ne comprend sûrement pas ce qui lui arrive. « Comment cela va-t-il se faire ? », demande Marie à l’ange. Et tout simplement, l’Ange la rassure, « L’Esprit Saint viendra sur toi ». Sur ces mots, dans une confiance inconditionnelle, Marie offre sans réserve au Dieu de la Promesse tous ces projets d’avenir, « Voici la servante du Seigneur, que ta parole se fasse en moi ». Cf. Luc 1, 34-38.

Et encore, dans cette histoire du Verbe, nous trouvons les Mages, des hommes d’écoute attentive à leur environnement. Ils marchent en attitude de discernement. Ces Mages arrivent à Jérusalem. Ils suivent l’étoile du Roi des Juifs et ils désirent se prosterner devant ce Roi. Voilà le désir qui les fait avancer sur des chemins inconnus. « Alors Hérode convoqua les Mages en secret pour leur faire préciser à quelle date l’étoile était apparue. Puis il les envoya à Bethléem, en leur disant : Allez, vous renseigner avec précision sur l’enfant. Et quand vous l’aurez trouvé, venez me l’annoncer pour que j’aille, moi aussi, me prosterner devant lui ». Cf. Matthieu 1, 1-8. Les Mages, après avoir entendu Hérode, partirent, prenant ainsi le chemin que l’étoile leur indiquait. Ils ont trouvé l’enfant et leur joie a été immense. Cependant, ils regagnèrent leur pays par un autre chemin. 

Joseph, Marie, les Mages, toutes ces belles figures de l’histoire du Verbe nous apprennent que se rendre disponible à la voie du Seigneur, c’est courir des risques, de sacrés risques ! Dieu propose à Marie et à Joseph un neuf tellement neuf que, par exemple pour Joseph, il s’est senti complétement décoiffé, pensant et avec raison, aux rumeurs… que vont raconter les autres sur cette histoire ?  Marie a réagi autrement, visiblement avec plus de sérénité, sans accorder trop d’importance à tout ce qui pouvait être dit par l’entourage. Elle est plutôt partie en hâte rencontrer Élisabeth, retrouver quelqu’un, de qui l’ange lui avait parlé, et qui était dans la même situation qu’elle : c’est-à-dire appelée à accueillir l’impensable. « Heureuse celle qui a cru à l’accomplissement des paroles qui lui furent dites de la part du Seigneur ». Cf. Luc 1, 45. On n’est vraiment pas pareil !

Tous ces récits de Noël et de l’Épiphanie sont bien colorés de surprises, de nouveautés, d’imprévus, d’étonnements, de tâtonnements, d’empressements, et de curieuses rencontres. Joseph, Marie, les Mages ont reçu, chacun à sa façon, des mots incompréhensibles, parfois des mots blessants. Par moments, ils se sont sentis exclus, ont été mis à l’épreuve, ont vécu des situations d’inconfort, sont passés par des combats intérieurs et extérieurs. Cependant, comme un déclic, ils se sont laissés conduire par la lumière constante d’une étoile. Ils se sont laissés conduire par une parole éclairante. Ils se sont laissés conduire par une lumineuse certitude intérieure. Ils se sont laissés conduire parce qu’ils ont prêté l’oreille à la fine voix de l’Esprit, une voix à peine audible dans nos sociétés d’alors et d’aujourd’hui. C’est vrai que ces récits sont remplis de lumières, pleins de lumignons, mais aussi de pauses d’obscurité, parfois assez sombres… 

On dirait que ces récits sont les nôtres, n’est-ce pas ? Bien sûr, toute mesure gardée, mais ce sont les nôtres, le récit de chacun et de chacune de nous, ré-actualisé, re-contextualisé. Essayons de nous faufiler à l’intérieur de ces personnages. Laissons-les nous habiter et prenons le risque de sortir de nos emprisonnements d’esprit et de nos captivités spirituelles. 

Allons-y, laissons-nous nous émerveiller en contemplant le Verbe incarné comme une graine. Une toute petite et minuscule graine enfouie dans le silence de la malléable terre. Soudain, le vert éclatant de la petite graine perce dans le foncé de la terre. Peu à peu, elle grandit, s’épanouit en taille et en espace. De la minuscule graine jaillit une vie que rien n’arrête. Quelle abondance surprenante ! 

La graine se transforme lentement dans ce qu’elle était, sans être exactement et visiblement ce qu’elle était.    La Vie se manifeste discrètement et sans s’imposer, elle dit pour qui veut l’entendre : « Le Verbe s’est fait chair, il a habité parmi nous (…) plein de grâce et de vérité ». Cf. Jean 1, 14. C’est ainsi que l’espérance de Dieu a planté sa tente parmi nous. Si nous consentons, elle éclaire gratuitement nos pas douteux et tâtonnants. L’espérance de Dieu nous invite, à nous ouvrir en grand, à des chemins nouveaux. Ces chemins ont été pris par Joseph, par Marie, par les Mages. Ces chemins peuvent être aussi les nôtres, si nous nous mettons en route dans une attitude confiante, en vivant dans la confiance et en confiance. Marie s’est mise en route et a pris le chemin avec empressement vers une région montagneuse. Cf. Luc 1, 39. La confiance de Marie s’est tenue debout.

Est-ce que dans ce Noël, j’accepte d’être graine, une graine d’espérance enfouie là où je me trouve, dans ma communauté, ma famille, mon travail, mon quartier, ma paroisse, etc. ? Être graine d’espérance, quel grave défi ! Si j’accepte de courir ce risque d’être graine et de mourir comme la graine, alors tout est possible, « Ne craignez pas, je vous annonce une bonne nouvelle. (…) Aujourd’hui, vous est né un Sauveur qui est le Christ, le Seigneur. Et voici le signe qui vous est donné : vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire ». Cf. Luc, 2, 10-12. La Vie devient profondément possible, là où l’on ne s’attendait pas. 

Soeur Eugénie Caps

C’est aussi, cette même espérance qui a conduit notre Fondatrice. Elle a accepté librement d’être graine. D’être graine tout au long de son chemin sur terre. Aujourd’hui, à travers ses Écrits, Sœur Eugénie Caps continue à nous rappeler, « Dieu veut avoir besoin de nous. Soyons comme de la cire molle entre ses mains bénies. (…) Soyons toujours bien courageuses, bien généreuses au service du bon Dieu ». Cf. Lettres de Sœur Eugénie Caps à Catherine Frentz, Collection Spiritaine 2, page 31. C’est Lui et seulement Lui « la lumière qui brille dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont pas arrêtée ». Cf. Jean 1, 5. Qui arrêtera alors l’espérance de Dieu ?

Regardons, autour de nous, les petits et divers signes, bien souvent inattendus… Et à l’image de Joseph, de Marie et des Mages avançons, avançons sans peur, avançons dans la confiance, avançons ensemble dans l’Espérance. Et laissons-nous, comme dans un mouvement magique de Noël, envelopper, traverser par la douceur rafraîchissante de cette brise, qui jaillit de l’Évangile susurrant à l’oreille de nos cœurs, « Au commencement était le Verbe ». 

Au commencement…

À vous mes Sœurs et à tous nos Amis, je vous souhaite de tout cœur un Noël plein de l’espérance des Commencements et une Année 2024 rythmée au son de la Grâce et de la Vérité de Jésus Christ. 

Dans la douce tendresse, que nous inspirent les récits de Noël, je vous embrasse toutes et tous.

 

Sœur Olga Fonseca

Supérieure générale des Sœurs Spiritaines