Mes Chères Sœurs,

Chers Amis,

Le récit de l’Évangile nous raconte que Jésus était mort, que les portes étaient verrouillées, que les disciples avaient peur et dans ce contexte de désespoir… soudain, Jésus vient au milieu d’eux. Jésus est là. Et le premier mot qui sort de sa bouche pour rassurer les disciples, c’est un mot de Paix, « La paix soit avec vous ! ». Cf. Jean 20, 21. 

Jésus ne se justifie pas d’être mort, ni d’avoir disparu, ni non plus d’être revenu à l’improviste. Il ne se justifie pas d’avoir provoqué tout cet étonnement, ni d’avoir créé une certaine confusion dans nos faibles esprits. Non, Jésus ne dit rien d’autre que d’offrir la Paix, sa Paix à Lui. Le don de la Paix donné par l’intensité de sa présence. Une présence libre et qui nous libère.

A leur tour, les disciples ne lui ont pas demandé non plus, qu’est-ce qu’il faisait là ? Ou encore qu’est-ce qui lui est arrivé ? La réponse était là devant leurs yeux et dans leurs cœurs. La réponse à toutes leurs questions était tout à coup, là, dans la présence vivement intense de Jésus. Cette présence de Jésus, même inattendue, a enlevé les doutes qui planaient dans leurs cœurs. La surprenante présence de Jésus a remis les disciples sur le chemin de la liberté et de la confiance.

Et c’est intéressant de souligner que le Seigneur vient à leur rencontre au moment où ils sont ensemble. C’est ensemble qu’ils reçoivent le don de sa Paix. Paix qui rassure. Paix qui rend libre. Paix qui redonne confiance. Paix qui souffle l’audace de l’Espérance.

Tout à coup, le doute et la peur qui verrouillaient leurs portes ont disparu. Ce passage de l’Évangile nous dit avec force et clarté que la présence du Seigneur libère les esprits confus et les cœurs chargés et que le don de sa Paix rend les disciples épanouis et terriblement libres. La suite du récit, nous montre les fruits de la liberté chez les disciples. La paix du Seigneur et sa présence ne se conjuguent absolument pas avec peur ni lâcheté, mais avec confiance et liberté. Le choix de cette conjugaison nous appartient.

Le texte nous dit encore que les disciples ont été remplis d’une joie, sûrement d’une joie immense, en voyant le Seigneur. Nous imaginons la scène du récit telle qu’elle nous est transmise… Quelle sacrée surprise ? Quelle joie inouïe ! En fait, quand on aime quelqu’un, quand on estime vraiment quelqu’un, c’est comme ça que cela se passe, n’est-ce pas ? C’est-à-dire la présence de l’autre suffit, elle remplit dans un clin d’œil le temps et l’espace. C’est la joie en abondance. Et une joie en abondance pour tous.

C’est dans cette disponibilité personnelle et communautaire de dépassement des peurs, d’ouverture des cœurs et d’accueil de l’inattendu que le Seigneur souffle un air frais, une brise légère, un doux vent… Ce souffle inexplicable jaillit de la présence singulière du Ressuscité. Ce Saint Esprit ouvre ainsi l’avenir de ce Ressuscité, le Seigneur, à toutes les générations, à tous ceux et celles qui veulent devenir ses témoins. Oui, le Seigneur est vraiment ressuscité et nous en sommes témoins au fil du temps.

Tout cela me fait penser, sûrement à vous aussi, que le Seigneur vient nous rendre visite, nous rejoindre dans nos vacarmes au pire des situations… Bien sûr, si nous acceptons librement qu’il soit là. Le Ressuscité nous donne sa Paix, en nous fortifiant de sa présence, surtout quand tout semble aller très mal, quand tout semble ne plus avoir d’issue… quand tout ce que nous voyons devant nous ressemble à un mur bien serré, sans passage possible.

portrait de mgr jacques gaillot

Portrait de Mgr Jacques Gaillot, exposé à l’Église Saint-Médard, lors de ses obsèques.

Sur son lit d’hôpital, dans ce samedi saint, ce samedi rempli d’espérance où nous attendions le lendemain pour vivre la Pâque, Mgr Jacques Gaillot nous disait : « Quelle a été ma mission ? La mission que le Seigneur m’a confiée a été de libérer, libérer, libérer. Et toute ma vie, je n’ai fait que ça, libérer ». Il l’exprimait avec une lucidité sans ambigüité possible. Aux mots lourds de sens, cet homme avait la certitude d’avoir répondu à l’invitation du Ressuscité et il était prêt à rendre compte. Son visage communiquait une joie en abondance. Malgré les douleurs dans son corps, son esprit se tenait clair. Il avait un sourire ensoleillé, qui nous parlait déjà de la pleine certitude d’un lendemain de Pâques. Cet homme vif d’humanité nous transmettait tout simplement l’Évangile. Son regard intense nous fixait avec une admirable beauté. Sa façon respectueuse d’écouter nous communiquait sa bonté. Ses paroles disaient long de l’amitié qu’il avait avec son Maître et Seigneur. Il était paisible, profondément serein. On dirait qu’il connaissait de l’intérieur le cœur de Dieu… c’est vrai qu’il avait touché le cœur de l’homme dans toutes ses misères humaines… et lui-même, aussi, dans les hauts et bas de sa propre humanité, peut-être aussi de ses erreurs, il a connu le rejet, l’humiliation, la mise de côté… Cependant, Mgr Gaillot est resté viscéralement fidèle à la Parole de Jésus : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de toute ta force et de toute ton intelligence, et ton prochain comme toi-même ». Cf. Luc, 10, 27. Un homme élégamment droit, qui a rejoint le Ressuscité, dans l’octave pascale. Nous l’avons quitté, paradoxalement avec douleur et en même temps, remplies d’une joie en abondance. C’est aussi cela le souffle inattendu du Seigneur.

Dans nos différents parcours humains et de foi, chacun et chacune de nous vit sûrement des situations inespérées soit personnellement, soit en Congrégation, en famille, au travail, etc. Et c’est quand tout paraît aller au plus mal que, tout à coup, un tout petit air frais commence à circuler, venant de je ne sais où… et une paix remplie de force intérieure nous ouvre à une présence, que notre cœur nous dit être celle du Seigneur. Et alors à ce moment-là, moment de grâce, l’audace surgit, la confiance nous met debout et l’espérance nous fait marcher. Voilà l’inattendu du Ressuscité. Ce que nous n’avons jamais imaginé, ni pensé, ni idéalisé, ni projeté prend forme et ouvre des chemins surprenants tout à fait nouveaux. C’est bien cela le souffle du Ressuscité, c’est bien cela sa présence dans nos vies. C’est la joie en abondance pour nous et pour tous.

Père Émile Clauss

Eugénie Caps

Quand Sœur Eugénie Caps a écrit sa première lettre au Père Clauss pour lui exposer le projet de Fondation d’une nouvelle œuvre missionnaire, la réponse semblait au regard du reste du groupe des jeunes filles un refus, sauf pour Eugénie qui a vu dans la réponse du Père Clauss une brise légère qui porte un vent d’espérance : « Ils n’ont pas rejeté l’idée d’une nouvelle Fondation et, en nous disant qu’une œuvre missionnaire ne pouvait se restreindre à une seule maison en Lorraine, nous sommes tout à fait d’accord avec eux, il faut le leur dire ». Cf. Origines de la Congrégation, page 14. Voilà le souffle de l’Esprit d’audace.

Depuis octobre 2022, nous avons reçu plusieurs feuillets des Centenaires. Un premier groupe de feuillets, « La Promesse est une espérance », nous ont aidées à faire mémoire du premier Noviciat de la Congrégation et aussi à prendre le temps de relire nos propres noviciats. Maintenant, depuis mars 2023, nous sommes avec les feuillets qui nous invitent à méditer sur « Une œuvre née de l’Esprit d’audace ».

C’est tout à fait cela accueillir le Ressuscité : c’est s’ouvrir à la Promesse qui porte l’Espérance, c’est croire à notre Congrégation, croire à toute œuvre qui est née de l’Esprit d’audace.

Nous sommes toutes et tous invités par le Seigneur à quitter un esprit de mort, qui par moments nous envahit et empêche notre créativité de s’épanouir. Nous sommes tous appelés par le Christ à dépasser nos peurs, qui nous immobilisent et nous rendent stériles. Nous sommes invités à accueillir la surprenante visite du Ressuscité, qui nous donne sa Paix en soufflant sur nous son Esprit d’audace. Et la douce force de cet Esprit nous remplira d’une joie abondante. Joie à partager avec tous et sans mesure.

Je vous souhaite une joyeuse fête de la Pentecôte, bien remplie du bon et suave vent de l’Esprit et de la joie en abondance pour partager avec tous.

Soeur Olga Fonseca, Supérieure générale des Soeurs Spiritaines, « Lettre éditoriale de la revue Bisannuelle Entre-nous Pentecôte 2023, n°483″.