« Le vent souffle où il veut ». Cf. Jean 3, 7-8. Nous avons voulu que ce souffle nous accompagne tout au long de cette année de célébration de notre 1er Centenaire de Fondation. Nous, femmes de notre temps, nous voulons nous laisser conduire par ce souffle saint, là où le Seigneur nous envoie.
Et voilà que ce désir de docilité au souffle du Seigneur est rythmé par une année qui a commencé par tellement d’imprévus… Alors, nous nous demandons, mais où est passé ce souffle du Seigneur dans tous ces évènements. Dans notre réalité humaine, sociale, économique et même religieuse missionnaire, la question se pose consciemment ou inconsciemment : où va nous conduire ce vent qui souffle là où il veut ? À vrai dire, nous ne comprenons rien de ce qui nous arrive.
Quelle aventure pour cette année du Centenaire ? La Covid avec ses confinements et règles sanitaires, la fermeture des frontières, le décès de plusieurs de nos Aînées dans un court temps, le refus des visas de long séjour, nos novices empêchées de rejoindre le noviciat international en France, des jeunes qui n’arrivent pas à rejoindre le postulat international au Sénégal en raison des frontières fermées. Et pourtant, nous sommes appelées sans cesse à marcher de l’avant, poussées par ce vent qui souffle, portant dans une main l’espérance et dans l’autre le zèle apostolique. Oui, animées par la foi du matin de Pâques nous « marchons sous la conduite de l’Esprit ». Cf. Galates 5, 25. Oui, conformes au désir profond de notre Fondatrice pour nous, nous croyons en cette année de Grâce, que « l’Œuvre marchera son chemin voulu. Que je désire que cette chère Congrégation naissante soit un nid de petites saintes et grandes saintes ». Cf. Journal de Sœur Eugénie Caps, 1922.
Entre-temps, face à tant d’obstacles, nous nous trouvons toutes, ensemble dans la même impasse, et « soudain comme un violent coup de vent » nos êtres sont habités par une force qui nous dynamise et nous nous mettons à espérer contre toute espérance, nous devenons « remplies d’Esprit Saint ». Nous acceptons ainsi que l’Esprit, à travers toutes ces épreuves, donne de la couleur à notre existence. Le récit de la Pentecôte, que nous relatent les Actes des Apôtres, c’est aussi le nôtre dans tout ce que nous vivons d’imprévisible en ce moment. Nous sommes là, ensemble là, et nous attendons.
Cependant dans cette attente, il faut aussi avouer que nous pensons au vide et aux ténèbres. Alors, c’est le moment de se souvenir que même là, le souffle de Dieu est présent. « La terre était informe et vide, les ténèbres étaient au-dessus de l’abîme et le souffle de Dieu planait au-dessus des eaux. Dieu dit : Que la lumière soit. Et la lumière fut. Dieu vit que la lumière était bonne, et Dieu sépara la lumière des ténèbres ». Genèse 1, 2-4. L’Esprit agit et il différencie la lumière des ténèbres, tout devient plus clair, plus net. Il ne supprime pas les épreuves, ni les différends entre nous, mais il nous donne une force intérieure, un regard habité par plus de foi. C’est la magie de la couleur qui ressort de ce que nous vivons. Des couleurs jamais vues, des couleurs ensoleillées, pleines de fraîcheur, de douceur. Ce souffle nous distingue les unes des autres nous permettant ainsi d’être uniques, tout en étant unies les unes aux autres, en nous ouvrant à la créativité, pour inventer d’autres chemins, jamais pensés auparavant.
L’Esprit met à part, appelle, interpelle, désinstalle. « L’Esprit Saint leur dit : Mettez à part pour moi Barnabé et Saul en vue de l’œuvre à laquelle je les ai appelés. Alors, après avoir jeûné et prié, et leur avoir imposé les mains, ils les laissèrent partir ». Cf. Actes des Apôtres 13, 2-3. C’est l’histoire de la mobilité de Paul et Barnabé en suivant le souffle de l’Esprit. C’est un parcours inattendu, surprenant, rempli de changements. L’itinéraire de Paul et Barnabé, nous montre bien que c’est le souffle de l’Esprit qui les conduit pour que le Seigneur, et lui seul, agisse et fasse des merveilles à travers eux. Cet épisode nous aide à nous souvenir que nous sommes tout simplement au service de la Mission du Seigneur et de nos frères et soeurs en humanité, « Va, et toi aussi, fais de même ». Cf. Luc, 10, 37. Pour le Père Libermann, « Notre Seigneur nous communiquera les dons les plus abondants de son Esprit-Saint, et nous ne pourrons pas les contenir. Et, par le moyen de ces dons, il sortira de nous comme des fleuves de grâces, qui les répandront sur tout ce qui nous environne ». Cf. Commentaire de Saint Jean, 328.
C’est vrai, cette brise légère, ce violent coup de vent nous déstabilise par moments dans nos programmes, nous provoque dans nos certitudes, nous pousse à prendre des directions inconnues. Mais de cette manière, il nous met en mouvement en traversant notre multiplicité de dons, de goûts, de limites, de fonctions, de fragilités et de tempéraments, afin de nous ouvrir au désir profond de L’annoncer. « Ce Jésus, Dieu l’a ressuscité ; nous tous, nous en sommes témoins. Élevé par la droite de Dieu, il a reçu du Père l’Esprit Saint qui était promis, et il l’a répandu sur nous, ainsi que vous le voyez et l’entendez ». Cf. Actes des Apôtres 2, 32-33.
Mes Sœurs, dans l’intimité de nos cœurs posons-nous la question : Est-ce que je veux avoir besoin de ce saint souffle, quel que soit mon âge ? Est-ce que je laisse la fraîcheur de ce souffle travailler mes pensées, mes sentiments, mes paroles, mes attitudes, à moi ? Est-ce que je permets vraiment à ce saint souffle de tisser des liens fraternels entre nous ? Est-ce que je laisse ce discret souffle traverser la diversité de nos manières d’être et de nos différentes origines, afin qu’elles deviennent une richesse au sein de notre Congrégation et un atout formidable pour une agréable vie communautaire ? Nous le savons, toutes, que la Pentecôte est là, pour chacune de nous, quand je m’ouvre entièrement et librement à ce saint souffle. Il est Pentecôte pour moi, quand les autres lisent en mes attitudes remplies de gratitude, de bienveillance, de confiance, d’espérance, la bonté du cœur. « À vous d’en être les témoins ». Cf. Luc 24, 48.
Mes Sœurs, pour témoigner de ce Saint Esprit de vérité, nous « spiritaines », prenons d’abord personnellement et puis ensemble, le temps de respirer, de bien respirer de ce magnifique souffle. Sentons le besoin de souffler. Sentons la nécessité d’inspirer et d’expirer sereinement. Laissons l’air circuler paisiblement en nous et autour de nous. Et alors, quelque chose se passera en chacune de nous, comme autrefois chez les disciples… et nous nous sentirons plus libres. Oui, « l’Esprit nous fait vivre, marchons sous la conduite de l’Esprit ». Cf. Galates 5, 25.
Je vous souhaite une fête de la Pentecôte très joyeuse et bien remplie du saint souffle.
Je vous embrasse avec beaucoup de tendresse en demandant à l’Esprit du Seigneur la grâce en abondance de tous ses dons pour chacune d’entre vous.
Lettre de Soeur Olga Fonseca, Supérieure générale des Sœurs Spiritaines, extraite du Bulletin de l’Entre-nous Pentecôte 2021, n°479.