A travers le récit de la vocation de Soeur Maria-Jacinta, nous découvrons comment les Sœurs Missionnaires du Saint-Esprit sont arrivées au Portugal pour y commencer la mission.
Sœur Maria-Jacinta est née le 5 Mai 1907 au Portugal, à Penso, diocèse de Lamego. Le 14 novembre 1941, elle entre chez les Sœurs Missionnaires du Saint-Esprit qui viennent d’arriver dans son pays. Après sa Profession perpétuelle, en 1950, elle est nommée Maîtresse des Novices et, en 1955, Supérieure Principale du district du Portugal. Elle devient Assistante générale de l’Institut en 1965. A la fin de son mandat, en 1971, la communauté d’Alvarães l’accueille jusqu’en 1994. C’est à la communauté de Betânia-Braga que le Seigneur vient la chercher le 12 septembre 1996. Elle nous partage la genèse de sa vocation écrite par elle-même.
J’avais quinze ans. La première lecture de « l’histoire d’une âme » m’a prise au cœur. La spiritualité de Thérèse de l’Enfant-Jésus m’a révélé son orientation morale et, dès ce moment, j’ai pris la résolution de me consacrer au service de l’Eglise. Quand et comment ? Je l’ignorais ; dans l’immédiat, je continuais mes études ; désormais, une force à la fois douce et impérieuse était en moi. Elle m’obligeait à être attentive pour ne pas m’écarter de mon idéal. En ce temps-là, dans mon pays, l’œuvre missionnaire était endormie. Très rarement, l’on entendait parler des missions et des missionnaires. Une fois, fortuitement, quelques petits articles de revues m’ouvrirent aux horizons de l’Afrique et de l’Orient, à la détresse de nos frères lointains. Un immense désir d’aller vers eux pour les aider et leur dire que nous avions un Père commun, monta en moi.
Aînée d’une famille de dix enfants, mes parents comptaient sur moi pour les aider. Malgré un travail acharné, mon père souffrait de ne pouvoir donner à ses fils l’instruction désirée qu’au prix de la dilapidation d’un patrimoine péniblement acquis. J’entrai dans l’enseignement afin de participer par mon salaire aux préoccupations familiales. Pour être déjà missionnaire dans la mesure du possible, je choisissais comme postes les villages sans prêtre. Dès que les classes des enfants étaient terminées, je m’occupais des jeunes filles et de la visite des malades. Tout en faisant moi-même le catéchisme, j’essayais de former des catéchistes qui étendraient mon action forcément limitée.
En l’espace d’un temps relativement court, le Seigneur rappelle à lui mes parents et les enfants se trouvent établis. Il me faut donc choisir une Société religieuse. A la lecture d’une petite feuille de propagande, un éclair jaillit, je serai missionnaire spiritaine et en y entrant, je suis sûre de partir en mission. Mais la Maison-Mère est en France ! J’irai ! Les démarches pour l’obtention de mon passeport étaient en cours quand survint la guerre de 1940. Impossible d’aller en France. Cette fois, je ne comprenais pas. Un mur s’était dressé devant moi. Je priais et j’attendais qu’il tombe.
Et voilà que la Supérieure générale des Spiritaines m’écrit « Puisque vous ne pouvez venir, nous irons à vous ». En mai 1941, j’eus la joie de faire sa connaissance. Malgré tout et contre tout, la fondation se fit. Trois sœurs françaises arrivèrent en août 1941 et le postulat s’ouvrit officiellement le 21 novembre. J’avais 34 ans et je ne pensais pas trouver d’obstacles dans cette nouvelle vie. Mais précisément, mon âge et l’habitude de mener les affaires, joints aux incompréhensions de la langue me mirent à dure épreuve. Et les nouvelles arrivées devaient tout apprendre de ma langue ! Le désir d’atteindre le but, la certitude de partir en mission, la joie de trouver en la doctrine libermanienne une parenté de fond avec celle de Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus et la grâce divine m’amenèrent à la profession le 28 mai 1944. Les chemins de Dieu ne sont vraiment pas les nôtres. Les atouts qui me semblaient décisifs pour aller en Afrique : âge, expérience, sont ceux que retinrent mes supérieures pour m’employer auprès de plus jeunes qui, elles, partent. J’eus l’occasion de les visiter sur leur terrain d’apostolat au Cap-Vert et en Angola. Et ce voyage aviva encore mon rêve, aider par les catéchismes, par une présence au milieu des pauvres à travailler effectivement à planter l’Eglise dans les milieux où elle n’est pas.
Voilà qu’un autre coup du Seigneur m’oblige à rester en Europe ma nomination de Conseillère générale de 1965 à 1971. Il me semble qu’il me reste à accepter docilement la Volonté du Père et, jusqu’à la fin de mes jours, être missionnaire par l’amour. C’est vrai que le Seigneur me fait parcourir certains sentiers qui n’étaient pas dans mon « agenda » cela ne m’empêche pas de le remercier tout le temps de la vocation qu’il m’a donnée.
A la communauté d’Alvarães, durant de longues années et autant que sa santé le lui permettait, Sœur Maria-Jacinta continua à rayonner le Seigneur « réconfortant tout le monde de ses paroles pleines d’amitié » comme l’écrivit le journal du diocèse lors de son décès.
En tant que Figure Spiritaine de la Congrégation, nous retiendrons son union à Dieu, une priorité pour elle, sa dévotion envers Notre-Dame, son dynamisme et sa capacité d’entreprendre, sa capacité d’accueil vis-à-vis de toute personne, quelle que fût sa position sociale et, par-dessus tout, son esprit missionnaire, elle a cherché à faire revivre l’esprit missionnaire de notre fondatrice.
Voici l’Hommage que lui rendit Sœur Ana-Cândida, alors Supérieure principale du Portugal : « Pour la gloire de Dieu et l’encouragement de toutes les Spiritaines, j’aimerais faire ressortir la rôle important que Sœur Maria Jacinta a joué dans l’Institut, principalement au Portugal. Douée de nombreuses qualités humaines et spirituelles, elle a su jeter les bases d’une vie missionnaire spiritaine dans le pays et accueillir les vocations que Dieu a bien voulu nous envoyer. Elle avait un vrai sens de la mission de l’Eglise, était ouverte à la nouveauté de l’Evangile, aux appels du monde et des pauvres. Dans son cœur, il y avait place pour tout le monde ».
Sr Paul Girolet